La découverte de l'héliocentrisme
Qui a dit le premier que la Terre tourne autour du Soleil ? Copernic évidemment ! Eh bien non ! Au IVè s.av. J.-C., un certain Aristarque de Samos, philosophe grec de son état, avait, selon Archimède, soutenu la même idée. Avec quels arguments ? Nous ne saurons jamais. Ses écrits sur le sujet ont disparu. Copernic lui même n'a jamais apporté de preuves indiscutables à l'appui de la thèse héliocentrique. Ses successeurs le feront. Le vrai mérite de l'astronome polonais est d'avoir osé contester le modèle géocentrique du Moyen Age, qui plaçait la Terre au centre de l'Univers. Chronique d'une révolution astronomique.
Un astre trompeur
2000 ans avant JC :
La course étrange du Soleil a suscité très tôt la curiosité de nos ancêtres. Mettez-vous à leur place ! Coucher de soleilChaque matin, ils voyaient se lever à l'est un énorme disque lumineux.Ce disque décrivait un demi-cercle au dessus de leur tête avant de disparaître à l'ouest !
Où donc se cachait le Soleil pendant la nuit ? La solution la plus naturelle était d'imaginer une trajectoire inverse de celle accomplie pendant la journée: I'astre circulait incognito sous la Terre, que l'on croyait plate, pour réapparaître à l'est au petit matin. Cette idée prévaudra dans toutes les vieilles civilisations de I'Antiquité: mésopotamienne, égyptienne et grecque.
Le cosmos selon Platon
Platon5ème siècle avant JC :
dès le 6ème siècle avant JC, les Grecs ont cherché à donner un sens et une organisation au Cosmos. Vers 450 avant JC, le philosophe Anaxagore imagine le premier que les "étoiles" mobiles, autrement dit les planètes, sont des cailloux éclairés par le Soleil. Quelques dizaines d'années plus tard Platon fait de la Terre le centre de l'univers. D'après lui, la Lune, puis dans l'ordre le Soleil, Vénus, Mercure, Mars, Jupiter et Saturne tournoient sur des orbites de plus en plus vastes autour de notre monde.Le système du philosophe repose sur des préjugés : les orbites sont forcément circulaires pour la beauté de la géométrie ! Un élève de Platon, Eudoxe de Cnide, tentera de concilier les préjugés esthétiques du maître avec le mouvement réel des planètes. Une gageure ! Eudoxe ne se décourage pas et propose de régler le ballet planétaire avec 27 sphères centrées sur la Terre.
L'univers est un oignon !
4ème siècle avant JC :
comme les planètes refusent obstinément de danser sur la chorégraphie composée par Eudoxe, Aristote, qui attache beaucoup d'importance aux observations, va compliquer encore le système. Résultat de ses cogitations: un Univers qui ressemble à un oignon. Pas moins de 55 sphères, où sont incrustées planètes et étoiles, tournent autour de la Terre ! PtoléméeMais, à cause de ses trajectoires circulaires, ce modèle pourtant très sophistiqué est incapable d'expliquer les variations de luminosité de Vénus. Au 3ème siècle avant JC, Aristarque de Samos inverse la proposition: la Terre tournerait autour du Soleil !
Cette idée révolutionnaire fera long feu tant elle paraît contraire à ce que nos yeux contemplent chaque jour. En définitive, après sept siècles de débats, c'est le modèle géocentrique qui l'emporte.Au 2ème siècle après JC, le géographe et astronome Ptolémée en donnera une version améliorée avec quelques "pelures d'oignons" supplémentaires: 80 cercles au total !
Voir le système de Ptolémée
Le soleil au centre du monde
16ème siècle :
le travail de Ptolémée, redécouvert au Moyen Age, devient la référence absolue en matière d'astronomie. Un système intouchable, enseignéCopernic dans toutes les universités d'Europe et qui a, de surcroît, les faveurs de l'Église.C'est pourtant de ses rangs que va venir la première contestation. Un chanoine polonais, Nicolas Copernic, soutient dans un mémoire rédigé vers 1510 que le Soleil est à peu près au centre du monde et que toutes les planètes tournent autour ! À l'appui de sa thèse, Copernic n'apporte pas de preuves réellement décisives. L'Univers qu'il imagine lui paraît plus simple et plus harmonieux que celui de Ptolémée. Le système héliocentrique de Copernic, comme celui d'Aristarque de Samos, dix-huit siècles auparavant et pour les mêmes raisons, ne rencontrera qu'un succès limité auprès de quelques astronomes professionnels.
Voir le système de Copernic
Les preuves de Képler
17ème siècle :
un astronome allemand, Michael Mastlin, a été séduit par les idées de Copernic. Il transmettra ses convictions héliocentriques à l'un de ses meilleurs élèves, Johannes Kepler. Le jeune homme est persuadé qu'il existe une relation entre la durée de révolution des planètes et leur distance au Soleil.Képler Mais il lui manque des données fiables pour vérifier ses intuitions. En 1601, I'astronome danois Tycho Brahe (qui avait également établi un nouveau modèle qui combinait système de Ptolémée et de Copernic) meurt et lègue la totalité de ses impressionnants relevés astronomiques à son collègue allemand. À partir des données très précises de Brahe, Kepler découvre que les planètes décrivent autour du Soleil, non pas des cercles, mais des ellipses ! Mieux : la vitesse des planètes n'est pas constante. Plus elles sont proches du Soleil, plus elles vont vite. Le vieux système géocentrique de Platon et de Ptolémée, qui supposait un mouvement circulaire et uniforme des planètes autour de la Terre, a du plomb dans l'aile.
Voir le système de Tycho Brahé
Un procès inutile
17ème siècle :
Pendant que Kepler sue sang et eau sur d'épouvantables calculs de trajectoires, Galilée, en Italie, fabrique une lunette astronomique qui grossit 30 fois. Le savant transalpin connaît les travaux de Copernic, et il sent bien que le système géocentrique de Ptolémée a fait son temps.Galilée Mais il lui manque une preuve concrète pour l'abattre définitivement. En janvier 1610, Galilée braque sa lunette sur Jupiter et découvre stupéfait que 4 petites " lunes" tournent autour de la planète géante. Ainsi, contrairement à ce qu'affirmait l'astronome grec, tous les astres ne gravitent pas autour de la Terre, et certains possèdent des satellites semblables à notre Lune !
Galilée est désormais convaincu que la Terre n'est qu'une planète comme les autres et qu'elle tourne, elle aussi, autour du Soleil. Son retentissant procès, où l'Eglise le contraint à renier ses convictions, ne changera rien. Car, à l'instar de Galilée, et devant l'accumulation des preuves, les autres astronomes vont définitivement opter pour le monde de Copernic.

Texte tiré de sciences et vie junior 67